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toutes les russies

parchemins. Il le fut en réalité et sincèrement. Il cessa d’en remplir les devoirs tout en continuant d’en exercer les droits, par le seul effet de sa volonté sans consistance. De là provient une large part des malheurs de la Russie ; ils ont leur origine dans la déplorable incompréhension de sa mission dont, en cette circonstance, fit preuve un prince bien intentionné mais faible et désorienté.

Instruit par une expérience chèrement achetée, Nicolas ii a l’occasion aujourd’hui de donner à son trône une base de granit, en même temps qu’il effacera d’un geste magnifique les iniquités dont il a porté injustement le pénible fardeau. Qu’au lieu d’accorder aux individus une émancipation dont le bienfait est à tout le moins discutable, il commence par émanciper les collectivités chargées de chaînes par ses ancêtres. Par un singulier retour de la destinée, ce n’est plus faire acte d’opposition que de répéter désormais la parole qui causa naguère un scandale si retentissant. C’est au contraire exprimer un souci chaleureux des intérêts de nos chers alliés à qui leurs infortunes nous doivent, si possible, rattacher plus étroitement encore. « Oui, Sire, vive la Pologne dont vous êtes le roi ! vive la Finlande dont vous êtes le grand-duc ! vivent toutes les Russies dont vous êtes l’empereur ! Souvenez-vous, dans ces jours d’épreuve, qu’il y a là des sources de patriotisme, de fidélité et de travail qui furent imprudemment murées et qui, plus tard, pourraient se trouver taries. Hâtez-vous. Vous imposerez silence à vos ennemis, vos amis se réjouiront et le monde, ému, s’inclinera devant la majesté bienfaisante de votre initiative impériale. »