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L’ESPAGNE ET SES FILLES


1er septembre 1902.

Mirabeau plaisantait déjà ceux qui, de son temps, annonçaient périodiquement l’irrémédiable décadence et la chute prochaine de l’Angleterre. Ce genre de prédictions est toujours en vogue : nombreuses sont les chutes et décadences promises à la curiosité contemporaine. Il y a d’abord cette même Angleterre qui met vraiment bien du temps à tomber ; mais cela ne décourage pas les prophètes. Il y a aussi l’Italie qui, dès qu’elle se fut unifiée, se vit condamnée à la ruine, au morcellement et à toutes sortes d’autres calamités ; ce qui ne l’empêche pas de se porter assez bien. Il y a surtout l’Espagne vouée, depuis l’avènement d’Alphonse XII, à une sanglante et inévitable révolution.

Alphonse XII a régné ; il est mort. Sa veuve est devenue régente ; la régence a duré, elle a pris fin. Alphonse XIII règne. Trente ans bientôt — près d’un tiers de siècle — ont passé sur cette monarchie qui n’avait à vivre que l’espace d’un matin, et rien n’annonce encore la catastrophe. Inutile de rappeler, n’est-ce pas, tout ce qui s’est produit dans l’intervalle ? Le régime qui a survécu à la perte de Cuba et des Philippines n’est tout de même pas un château de cartes.

Mais le fût-il et dût-il s’écrouler demain… Après ?… Est-ce que le roi du Portugal et le sultan du Maroc se partageraient avec la République française le sol de la Péninsule ?… L’indépendance espagnole est à l’abri de par