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la fortune de l’hellade

fixe. Et il retourne ses poches, ce pauvre gouvernement, et il étale ses comptes pour prouver qu’il ne peut pourtant pas économiser davantage. Cela va de soi. Ceux qui réclament des économies n’ont sans doute jamais jeté les yeux sur le budget grec. Ils ne verraient rien là qui pût décemment être rogné. Les dépenses militaires ? Pour la guerre et la marine réunies, la Grèce dépense moins que la Bulgarie pour son armée et pas beaucoup plus que la Serbie pour la sienne. L’instruction publique ? Malgré la modicité des traitements, les sommes inscrites au budget ne permettent d’entretenir que 4 316 instituteurs ; il en faudrait bien davantage. Les travaux publics ? Mais comment progresser sans construire des routes et des ponts ? Non, en vérité, les économies sont un vain mot lorsqu’il s’agit de la Grèce. Veuille M. Prudhomme s’en convaincre une bonne fois !

Seulement le problème national ne tient pas tout entier entre ces deux termes : impôts directs et économies. D’autres points de vue sont à considérer. Et d’abord la question du blé. Ici une coupable négligence éclate. Les personnes les plus compétentes en la matière estiment que, soit par l’amélioration des méthodes plus que rudimentaires actuellement en usage, soit par le défrichement des terres arables inutilisées, la Thessalie pourrait aisément pourvoir à la presque totalité des besoins du royaume. Or, entre 1896 et 1904, la Grèce a dû acheter à l’étranger pour 31 800 000 fr. de blé… S’il n’est pas loisible au gouvernement de faire que l’industrie hellène progresse rapidement et que des usines fructueuses s’établissent ici ou là, il peut beaucoup pour aider au développement de l’agriculture ; il pourrait aussi favoriser l’exploitation des richesses minières ; il pourrait surtout, après avoir ouvert la Grèce aux savants, s’occuper de l’ouvrir enfin aux simples touristes ; elle leur est fermée. Quatre jours pour se rendre à Delphes dans des conditions supérieures d’inconfort, d’héroïques efforts pour atteindre Dodone, cela a-t-il, je vous le demande, le sens commun dans un pays vers lequel des milliers de pèlerins