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LE PARTAGE NÉCESSAIRE


14 février 1905.

Tous ceux qui ont souci de notre empire indo-chinois — et ceux-là, Dieu merci, sont maintenant légion — ont jugé opportunes les sonneries de clairon par lesquelles divers journaux ont secoué la somnolence de la métropole et annoncé les premières lueurs d’une aube inquiétante. Il ne faudrait point cependant passer d’une sécurité intempestive à des alarmes irréfléchies. Pour ma part, j’entends bien que les Japonais ont pris leurs mesures de façon à attaquer, le cas échéant, l’Indo-Chine et je suis persuadé que les archives impériales de Tokio renferment sur nos possessions d’Extrême-Orient des dossiers infiniment plus exacts et plus complets que n’en possèdent à Paris le ministère des colonies et les autres administrations intéressées. N’empêche que l’on ne voit pas le Japon — même au lendemain d’un traité de paix avec la Russie beaucoup plus avantageux que celui dont il est permis d’escompter la conclusion encore lointaine — déclarant sous un prétexte quelconque la guerre à la France et dirigeant sans préambule sur le golfe du Tonkin des escadres agressives. Les Japonais ont tout intérêt à ne point enfermer, aux yeux de l’Europe, le fameux péril jaune dans des formules aussi tangibles ; il suffit de peser le langage habile et mesuré de leurs chancelleries pour sentir qu’ils ont parfaitement conscience de cet intérêt et prennent grand soin d’y subordonner leurs actes. Ils recourraient d’autant moins volontiers à