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la visite

ne saurait influer en quoi que ce soit sur les affaires intérieures car le président n’a pas le pouvoir, si même il en avait le désir, de prendre en cette circonstance un engagement valable à l’égard de la papauté. Évidemment on mécontentera un peu les fidèles de la petite chapelle desservie par M. l’abbé Charbonnel ; mais ces braves gens auront la ressource de prononcer quelques excommunications majeures et le journal l’Action qui leur sert de Semaine religieuse en fera part au public. Enfin il faudrait bien peu connaître l’Italie moderne et bien mal comprendre le caractère italien pour ne pas deviner la sympathie intéressée avec laquelle nos voisins verront le chef de la République française, hôte de leur souverain, se diriger vers l’auguste palais où réside leur pape… Car, dans tout cœur italien, le pontife a son logement, contigu aux vastes appartements réservés au roi. Ainsi donc tout le monde sera content hormis M. Charbonnel et notre dignité nationale se trouvera sauve en même temps que l’indépendance du gouvernement demeurera intacte. Voilà pour le point de vue français.

Le point de vue pontifical est plus complexe. Jusqu’ici, le Saint-Père a paru éprouver autant de satisfaction à recevoir les souverains hérétiques que de répugnance à accueillir les princes catholiques ; le fait que, parmi les premiers, il s’en est trouvé qui comptent plus de sujets catholiques que les seconds suffit à souligner l’illogisme d’une telle distinction. Au fond, ce n’était point pour empêcher le roi d’Espagne ou le roi de Portugal de paraître au Quirinal que le Vatican s’imposa naguère cette ligne de conduite bizarre et gênante ; c’était pour en interdire l’entrée au seul empereur d’Autriche. La France peut continuer à porter le titre de fille aînée de l’Église, mais le rang de fils aîné est tenu par François-Joseph. Ce Charlemagne attristé est le dernier qui consente encore à incliner, dans les cérémonies, son sceptre devant l’ostensoir et à humilier publiquement sa pourpre au pied des autels. La Papauté feint d’ignorer que les nécessités de la politique aient fait