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L’ŒUVRE DE PAIX


23 décembre 1903.

Si les pacifistes se montrent satisfaits de l’année 1903, c’est que vraiment ils ne sont point difficiles. Sans doute, au cours de ces douze mois, ils ont copieusement banqueté. Tudieu ! messeigneurs, que de festoiements, que de lumières électriques, que de foies gras et de musiques suaves ! Mais ils ont, en même temps, abondamment péroré et c’est une circonstance grave qu’à travers tant de discours, d’ailleurs fort éloquents, il demeure impossible de relever une parole sérieuse. On s’est salué, félicité, complimenté et embrassé. Rien n’a été dit qui permette de fonder une espérance solide et durable sur cet arbitrage qu’on nous présentait comme devant « abolir la guerre » et dont les débuts, il faut l’avouer, avaient déjà quelque peu trompé notre attente.

Bien plus ! un acte a été passé entre deux nations voisines et désormais réconciliées, acte que les pacifistes appelaient de tous leurs vœux ; on eût dit qu’il suffisait d’en prendre l’initiative pour convertir d’un coup tous les peuples et les pénétrer de la lumière nouvelle. Cette Pentecôte, hélas ! ne s’est pas produite, et comment aurait-elle pu se produire ? La convention franco-anglaise donne la mesure de ce qu’on doit escompter pour l’avenir en matière d’arbitrage. Oui, la chose est entendue ; les petites querelles douces, anodines, telles que relevés de frontières exotiques, indemnités pour dommages matériels ou sévices injustifiés,