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prendre le plus de pays possible et à en faire largement bénéficier l’entreprise dont la responsabilité lui incombait, mais M. Picard lui refusa, pour cela, tout crédit. J’assurai Mérillon que là où je passerais, je n’en servirais pas moins sa cause avec d’autant plus de ferveur qu’elle était aussi la mienne, du moment que « les Concours de l’Exposition tenaient lieu de Jeux Olympiques » : formule pauvre et pesante à laquelle nous avions dû nous arrêter en attendant d’y pouvoir peu à peu substituer quelque chose de plus élégant et raisonnable.

Ma première escale fut Berlin. Au cours d’un séjour de quelque durée, je pus, sans nuire à l’étude d’un autre ordre que je poursuivais, observer l’état d’esprit des dirigeants sportifs. Il n’était pas excellent. Le gouvernement impérial pourtant marquait beaucoup d’intérêt à l’Exposition de Paris et en donnait des preuves tangibles. De fait, la section allemande devait être l’année suivante un des « clous » du Champ de Mars et aider grandement à l’espèce de détente qui s’affirmait entre les deux pays. En 1899, on semblait encore loin d’une telle situation. Une réunion se tint au Palast par les soins du commissaire général allemand qui me convia ensuite à un lunch. Le lunch fut « froid », parce qu’il succédait à une séance épineuse. Non qu’il y eût mauvais vouloir défini, mais des craintes furent exprimées à l’endroit de la sécurité morale des athlètes allemands qui viendraient à Paris et « risquaient d’y être insultés ». Ainsi l’écrivait un Allemand de Paris à un des membres de la réunion, lequel eut le tort de donner lecture du message reçu par lui. Le prince Aribert d’Anhalt présidait et eut le tort plus grand encore de ne pas intervenir à propos. Je protestai bien entendu. Personne du reste ne