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xiv
Le Congrès de Psychologie Sportive
(Lausanne 1913)

La Suisse de la fin du XIXe siècle n’était point sportive, ou du moins d’elle on eût pu dire aussi « qu’elle l’était sans l’être tout en l’étant »… Elle l’était à la manière de Tœpffer qui n’était pas mauvaise, mais insulariste et pas du tout internationale. La Suisse avait ses gymnastes, ses tireurs, ses lutteurs alpestres et s’en tenait là. Elle n’aspirait point à des lauriers extérieurs et utilisait ses montagnes pour la marche et pas encore pour les sports d’hiver. Elle était politiquement très cantonaliste et se méfiait volontiers de ses pouvoirs fédéraux. Elle ne prit pour ces motifs aucun intérêt au rétablissement des Jeux Olympiques et sa carence ne m’avait pas affligé, car je ne la connaissais guère. Telle je la voyais, de loin, telle elle me semblait devoir demeurer. D’une évolution interne, les touristes qui la traversaient n’avaient nulle conscience et j’étais comme eux. Amené en 1903 par des circonstances fortuites à l’étude de ses institutions et mis en contact avec ses nouveaux rouages militaires, grâce à l’un de ses officiers les plus réputés, le colonel de Loÿs, je compris aussitôt qu’il y avait au centre de l’Europe un petit État dont les destins, bien loin d’être révolus, recélaient un avenir considérable et qui jouait en silence le rôle de jardin d’essai des nations civilisées. Dès lors, la Suisse m’intéressa infiniment.