Page:Coubertin - Lecons de gymnastique utilitaire, 1916.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 25 —

seulement il proscrit l’élan, l’ardeur excessive, la recherche du risque qui sont des caractéristiques psychologiques si essentielles en matière de sport mais ces caractéristiques, en y intervenant, l’annihileraient car la durée ne s’y obtient que par la prudence, la mesure, la sagesse… qualités austères dont il faut admettre comme naturel qu’elles ne suffisent pas à contenter la jeunesse.

Il va de soi que ce que je dis là ne s’applique pas à la « marche militaire ». Celle-là, collective, disciplinée, armée, voit intervenir des éléments qui en modifient complètement le caractère : but, moyens, satisfactions… tout diffère. Je ne parlais que du pauvre pékin, de celui auquel il arrive en vieillissant de dire pompeusement : « Mon sport, à moi, c’est la marche… » et d’avance, je cherchais à le mettre en garde contre son illusion de simple promeneur.



L’ÉQUITATION POPULAIRE

Avez-vous un cheval à votre disposition, que vous puissiez monter fréquemment ?… Alors, je ne m’occupe pas de vous. Avec quelques bons conseils et de la volonté, vous pouvez devenir un cavalier de deuxième ordre, sinon de premier. Ceux que j’ai en vue ici sont les jeunes garçons qui ont envie de monter à cheval et ne peuvent pas, faute de temps et surtout d’argent.

Tout garçon normal doit avoir envie de monter à cheval. La joie équestre est probablement la plus intense de toutes les joies sportives — et à coup sûr l’une des plus complètes. L’homme la devine rien qu’à regarder le cheval, si bien fait pour le porter. La vitesse et le rythme — les deux bases de cette joie — seront le prix du triple effort fourni par le cavalier : effort d’intelligence pour connaître l’individualité de l’animal et s’en bien servir ; effort de volonté pour se maîtriser soi-même, seul moyen de maîtriser sa monture ; effort corporel pour dresser les muscles à l’équilibre qu’exige une position inhabituelle et instable. Pour tout dire en trois mots, il s’agit d’être assoupli, confiant et attentif.

La confiance dépend pour une bonne part du degré d’assouplissement ; sans doute, le tempérament intervient ; une poltronnerie organique rendra les progrès lents, si elle ne les entrave pas tout à fait. Mais, en général, un garçon bien assoupli deviendra très vite confiant.

Or, que vaut ici l’assouplissement réalisé par la gymnastique et les sports ?… Rien du tout. C’est une expérience curieuse