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le 16 mai.

politiques, toutes celles qui s’exerçaient au nom d’un parti déterminé le trouvaient inébranlable ; il avait accepté d’être Président de la République ; trahir la République lui eût fait horreur ; et c’était la trahir que de servir les intérêts bonapartistes ou légitimistes. L’influence exercée au nom de la religion le trouvait tout autrement disposé ; par là il était accessible ; par là aussi l’action s’exerçait, incessante, et le maréchal la subissait d’autant plus aisément qu’en résistant aux républicains, il s’imaginait encore être utile à la République.

L’acte qu’il venait d’accomplir conservait, du reste, à ses yeux, le caractère de la légalité : en demandant au Sénat la dissolution de la Chambre des députés, il n’allait pas au delà de ses prérogatives : tout au plus les dépassait-il un peu en renvoyant ses ministres de sa propre autorité. Mais si la Constitution demeurait sauve dans la forme, l’esprit s’en trouvait manifestement violé ; le 16 mai fut — ou voulut être, puisqu’il échoua — un coup d’État moral. Il fut dirigé contre des idées plutôt que contre des hommes ; il visa à atteindre des doctrines, non des institutions.

Aussi demeura-t-il incompris pendant quelques jours ; le pays crut d’abord à un appel un peu brusque de son chef, le consultant en toute franchise pour obtenir de lui une orientation plus décisive et plus nette ; l’émotion se propagea à mesure que l’attitude du gouvernement vint souligner le caractère et la portée de l’entreprise. On se vit avec stupeur en présence d’une tentative énergiqne et malveillante dirigée contre l’opinion pour la maîtriser et la capter. Le clergé s’y associait avec ardeur. Le maréchal