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de la république.

confiance et dont les défauts et les petitesses ne sauraient diminuer le mérite assura la victoire, que facilitèrent d’autre part les querelles intestines des partisans de la monarchie.

Il semble qu’on l’ait compris à droite ; à partir de ce jour, M. Thiers devint l’ennemi commun. Les royalistes de la Chambre introuvable s’écriaient, en 1816, que M. de Richelieu, M. Decazes et Louis xviii conspiraient à « perdre tout ». Les conservateurs de l’Assemblée nationale virent en M. Thiers un « traître à la cause conservatrice ».

L’extrême gauche la répudiait de son côté, cette République modérée ; à ses yeux, ce n’était pas la vraie République ; Garibaldi, du fond de son île, protesta contre l’étiquette dont M. Thiers avait revêtu son gouvernement. On fit circuler des listes de pétitionnement en faveur de la dissolution de l’Assemblée ; à Versailles, combinaisons, commissions, motions, interpellations recommencèrent de plus belle. Les partis s’accusaient réciproquement d’avoir déchiré le « pacte de Bordeaux », lequel prit de la sorte, par un singulier effet de mirage, une importance rétrospective. Ainsi s’acheva l’année 1872, fertile d’ailleurs en événements de tout genre : au mois de septembre avait eu lieu une entrevue des trois empereurs ; un congrès radical cosmopolite pour « l’affranchissement du travail » s’était tenu à la Haye, et l’arbitrage de la Suisse avait mis fin au fameux conflit dit de l’Alabama, entre l’Angleterre et les États-Unis. Quand on réfléchit à ce que sont devenus la Triple Alliance, le socialisme et l’arbitrage, on se prend à songer que nos députés ne donnaient pas leur attention aux objets les plus dignes de la retenir.