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la question sociale.

une grande bataille municipale dont le résultat « se chiffra par 160,000 voix, 736 élus et 29 hôtels de ville emportés d’assaut[1] ». À partir de cette date on peut considérer que les socialistes forment un parti politique qui va influer sur la politique générale. En effet, aux approches des élections de 1893, une véritable concentration s’opère à leur profit. L’avant-garde du parti radical vient à eux. À l’issue d’un meeting important tenu à Albi, M. Millerand écrit : « Les fractions socialistes révolutionnaires ont compris l’utilité de l’action électorale. Elles ont proclamé la nécessité de l’union. Il reste à passer des paroles aux actes. Il y a dans ce pays une grande masse d’électeurs désabusés, échappés des cadres et des groupes où ils avaient été longtemps retenus. Le socialisme peut et doit les rallier. Il ne faillira pas à sa tâche[2].» C’est une époque de conversions à gauche. M. Jaurès, qui revient du centre gauche, et M. Goblet, qui arrive de moins loin, sont parmi les catéchumènes. Dans le discours qu’il prononce à Bordeaux en mai 1893, ce dernier déclare qu’au lieu de s’allier aux opportunistes, les vrais radicaux devront désormais s’allier aux socialistes, à la seule condition que ceux-ci « répudient nettement la violence et ne demandent qu’aux moyens légaux et pacifiques le triomphe de leurs idées », et aussi qu’ils cessent de renier l’idée de patrie. Le scrutin donne un résultat imprévu et surprenant ; les candidats socialistes obtiennent 599,588 suffrages. Cependant l’opinion ne s’émeut point.

Pendant ce temps l’entente internationale progresse par

  1. Manifeste du parti guesdiste en 1893.
  2. La Petite République française, 25 avril 1893.