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la république et l’église.

mémoire de Victor-Emmanuel venait d’être insultée par des Français. Une feuille publique, imprimée comme par enchantement et dont on s’arracha les numéros « improvisés », commenta le fait avec tant de complaisance et d’empressement qu’il fut difficile de ne pas croire à une préméditation, à un coup monté. Non seulement à Rome, mais dans toutes les villes de l’Italie, ce fut une explosion de rage antifrançaise en face de laquelle le cabinet de Paris manqua quelque peu d’énergie. Le ministre des cultes, par une lettre aux évêques, interdit momentanément les pèlerinages, ce qui fut en général approuvé ; mais on eût aimé à voir le ministre des affaires étrangères parler en même temps aux représentants du roi Humbert le langage qui convenait.

À la missive ministérielle conçue en termes un peu secs, Mgr Gouthe-Soulard, archevêque d’Aix, répondit par un factum d’une violence telle qu’il parut impossible de ne point le poursuivre. Le prélat comparut le 24 novembre 1891 devant la première chambre de la Cour d’appel de Paris et fut condamné, avec circonstances atténuantes, à une amende de trois mille francs. Le cardinal Richard lui avait offert l’hospitalité de son palais. Mgr Gouthe-Soulard reçut les félicitations et les adhésions de près de soixante évêques. Jamais peut-être le déplorable état d’esprit du corps épiscopal français ne s’était affirmé d’une façon si éclatante : jamais n’était apparu plus clairement le malentendu concordataire. On remarqua sous la plume académique et sobre de Mgr Perraud, évêque d’Autun[1], des

  1. « Au delà du prétoire où vous allez vous asseoir, écrivait Mgr Perraud à l’archevêque d’Aix, derrière ces magistrats qui ne seront pas