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la république et l’église.

augmente dans le groupe restreint et diminue dans le groupe large ». — 11 s’en faut pourtant que les catholiques de France soient aussi ardents, aussi belliqueux que leurs frères de Belgique, et en ne comptant que ceux qui bataillent, on risquerait de se méprendre sur la force qu’ils représentent dans la nation ; par contre, analyser l’état d’esprit religieux de la nation elle-même, prise dans son ensemble, est chose relativement aisée. Les premières années de la République ont été marquées, nous l’avons vu, par une explosion de mysticisme tout à fait étrange : on a voué la France au Sacré-Cœur ; on a multiplié les pèlerinages, créé des dévotions nouvelles et poursuivi, sous couleur d’unification liturgique, un assujettissement plus complet et plus définitif de l’Église gallicane à l’Église romaine. Ces exagérations déplurent manifestement au pays et contribuèrent pour une très grande part à l’orienter vers les hommes de gauche, auxquels il donna pour mandat de s’opposer à l’ingérence du prêtre dans le gouvernement et de se garder en même temps de toutes mesures persécutrices. Les élus n’ont pas toujours suivi très exactement les recommandations des électeurs. Ils se sont laissé entraîner, sinon à persécuter, du moins à tracasser. On trouve dans la loi municipale de 1884, aussi bien que dans la loi scolaire et dans la loi militaire[1], des traces évidentes de l’esprit sectaire. Au Parlement, il y a des excès de zèle anticlérical ; un jour on supprime les bourses des sémi-

  1. Il est bon de rappeler que, quand vint devant la Chambre la proposition d’abrogation de l’article 20 de la loi militaire du 27 juillet 1872, exemptant les séminaristes et les instituteurs, — M. Paul Bert en était le rapporteur, — MM. Jules Ferry et Constans défendirent avec beaucoup d’énergie, mais en vain, les prérogatives du clergé.