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de la république.

que M. de Bismarck ne vit point ; en revanche, cette attitude de l’Allemagne n’a pas été sans bénéfices pour nous. L’état de paix armée a pu peser lourdement sur nos finances et paralyser même, à diverses reprises, notre vie nationale. Qui oserait prétendre qu’il n’a pas aidé à l’œuvre de reconstruction en maintenant unies toutes les bonnes volontés, en commandant aux représentants du peuple la sagesse et la prudence, en écartant les dangers d’une confiance et d’une sécurité trop complètes ? L’Allemagne a certainement entretenu chez nous une féconde émulation et empêché de s’éteindre l’ardeur des premiers jours.

Les membres du gouvernement de la Défense nationale avaient hâte d’en appeler au suffrage universel et de lui faire approuver les actes que le souci du salut public les avait amenés à accomplir. Mais il était dans leur destinée d’avoir à faire aux circonstances le sacrifice des doctrines qu’ils avaient toujours professées ; ils se virent forcés de gouverner sans contrôle, de maintenir la disçipline militaire dans toute sa rigueur, et même de faire usage de ce plébiscite dont ils condamnaient si énergiquement le principe sous le régime précédent[1]. Dès le 8 septembre 1870, les électeurs avaient été convoqués pour le 16 octobre suivant, à l’effet d’élire une Assemblée constituante : peu de jours après, la convocation fut avancée au 2 octobre[2]. Mais M. de Bismarck avait trop d’intérêt à

  1. Dès que la reddition de Metz fut connue, une émeute éclata à Paris ; ce fut la journée du 31 octobre : le gouvernement en triompha ; mais, se sentant ébranlé et ne voulant pas convoquer un conseil municipal qui eût amené l’établissement de la Commune, il eut recours au plébiscite ; 550,000 votes favorables contre 60,000 consolidèrent sa situation et l’aidèrent à se faire obéir.
  2. Décret du 16 septembre 1870.