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le triomphe de la république.

pliquait, s’excusait presque. Seulement il était aisé de deviner que la foule, toujours simpliste, en viendrait à couvrir d’un même mépris juifs et chrétiens, et étendrait aux capitalistes en général la responsabilité des pratiques détestables qui venaient de lui être révélées. Il ne pouvait résulter de tout cela qu’un progrès des idées socialistes et une force d’argumentation ajoutée à celles dont disposent les partisans de la limitation des fortunes privées. Le monde politique avait été le plus visé ; il était le moins atteint. On avait voulu établir la vénalité des « nouvelles couches » : on arrivait à démontrer leur résistance à une tentation dont le public ignorait jusque-là la force et la fréquence ; au lieu de prouver que beaucoup de votes avaient été vendus, on prouvait qu’il s’était trouvé beaucoup de monde pour les acheter, ce qui était bien différent.

Comme s’apaisait l’effervescence panamiste, une crise ministérielle intervint, et M. Charles Dupuy devint président du conseil[1]. Dans la déclaration lue devant le Parlement, on remarqua cette courte phrase qui formulait avec une brusque et noble franchise la moralité à tirer des derniers événements : « Une leçon, toutefois, se dégage de ces épreuves : c’est que l’aisance et la fortune ne s’acquièrent que par le travail et ne se conservent que par la correction des mœurs et la dignité de la vie. » Nul mieux que le nouveau chef du cabinet, qui, sorti des rangs les

  1. Les douzièmes provisoires votés à la fin de 1892 étant épuisés, il avait fallu en voter de nouveaux : un conflit financier éclata entre les deux Chambres, et le cabinet fut renversé. Après une tentative infructueuse de M. Méline, M. Charles Dupuy forma le nouveau cabinet. MM, Develle, Viger, Viette, le général Loizillon et l’amiral Rieunier conservèrent leurs portefeuilles. M. Poincaré prit l’instruction publique, M. Peytral les finances, M. Guérin la justice, et M. Terrier le commerce.