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le triomphe de la république.

laissant à la génération suivante le soin de former une véritable droite républicaine, si l’initiative du Saint-Siège n’était venue détourner d’eux un grand nombre d’électeurs catholiques. Nous aurons occasion d’étudier ce grand mouvement[1], auquel on s’accorde généralement à donner pour point de départ le discours adressé par le cardinal Lavigerie, en 1890, aux officiers de l’escadre française.

Un autre résultat de la victoire républicaine fut d’assurer enfin cette stabilité ministérielle qui n’avait été obtenue que par Jules Ferry, de 1883 à 1885, et dont le secret semblait s’être aussitôt perdu. M. de Freycinet, qui prit la présidence du conseil au début de 1890 et la garda deux ans, dirigeait déjà le ministère de la guerre depuis le mois d’avril 1888[2]. Il y avait été accueilli avec méfiance : beaucoup de personnes se résignaient mal à voir un ministre civil à la tête de l’armée ; on se souvenait, d’autre part, de la façon peu satisfaisante dont, à plusieurs reprises, il avait géré les intérêts diplomatiques de la France. Mais, cette fois, un homme nouveau se révéla en lui ; complètement dévoué aux intérêts professionnels dont il avait la garde, s’entourant des conseils les plus autorisés[3], il mena avec suite et méthode une œuvre considérable. Il

  1. Voir le chapitre x : « La République et l’Église. »
  2. M. Tirard, qui cherchait une occasion de se retirer, prit pour prétexte un vote hostile du Sénat à propos de l’expiration du traité de commerce de 1861, entre la France et la Turquie. M. de Freycinet forma le nouveau cabinet avec MM. Rouvier, Barbey, Yves Guyot, qui conservèrent les portefeuilles des finances, de la marine et des travaux publics, Léon Bourgeois (instruction publique), Ribot (affaires étrangères), Develle (agriculture), Jules Roche (commerce) et Fallières (justice). M. de Freycinet conserva son portefeuille sous les ministères Loubet et Ribot ; il resta cinq ans (de 1888 à 1893) à la tête du département de la guerre.
  3. Peu après l’avènement du ministère Freycinet, le général de Miribel devint chef d’état-major général de l’armée.