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la crise (1885-1889).

chaient à se faire arrêter dans les réunions électorales et à se faire expulser des séances de la Chambre, jugeant excellent ce genre de réclame[1].

Les élections départementales pour le renouvellement de la moitié des conseils généraux leur portèrent le premier coup. Boulanger, par un manifeste aux allures impériales, posa sa candidature dans 80 cantons, choisis avec grand soin parmi les 1,439 qui élisaient des conseillers généraux. Il fut élu 12 fois seulement, et, après le ballottage, on vit que les républicains conservaient la majorité dans 74 conseils sur 90. Le procès devant la Haute Cour se déroula lentement. La droite sénatoriale, après s’être déclarée incompétente, se retira ; mais quand on connut le réquisitoire du procureur général Quesnay de Beaurepaire, la condamnation de Boulanger ne fit plus de doute, et chacun comprit son empressement à mettre la frontière entre ses juges et lui. Le réquisitoire eût certainement gagné à être plus bref et à ne contenir que des faits probants et prouvés ; un certain nombre ne l’étaient qu’insuffisamment. Mais l’attentat contre la République ressortait de l’ensemble des témoignages recueillis avec une évidence telle qu’il était impossible de le nier, pour peu qu’on fût de bonne foi.

Les élections eurent lieu le 22 septembre et le 6 oc-

  1. Les séances des 22, 25, 27, 29 juin et 3 juillet comptèrent parmi les plus tapageuses et les plus indécentes. Pour donner une idée du diapason auquel s’élevaient les violences, on peut citer ces paroles de M. Laisant, prononcées au cours d’une réunion électorale et qui valurent à leur auteur d’être traduit devant un conseil d’enquête militaire, comme chef de bataillon de l’armée territoriale, et d’être radié des cadres : « Si la guerre était déclarée, je ne prendrais pas mon poste, face à l’ennemi, sachant que j’aurais derrière moi des hommes comme Constans et Thévenet… Qui sait si, un jour, ils ne livreront pas leur patrie à l’étranger ! »