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la crise (1885-1889).

l’agitation ouvrière organisée par les « chambres syndicales et groupes collectifs indépendants de la Seine », ni à rouvrir les portes de la France au duc d’Aumale, ni à surseoir à des laïcisations d’hospice déjà ordonnées, ni surtout à réclamer le vote d’une loi réglant la procédure du Sénat siégeant en qualité de Haute Cour de justice. Ce dernier acte était significatif. Il causa d’abord quelque surprise. Parmi ceux qui s’inquiétaient le plus de constater les progrès du boulangisme, beaucoup ignoraient encore la part de responsabilité qui revenait à Boulanger lui-même, sa perversion, ses lointains calculs, ses agissements ; ils se demandaient, tout en le sentant coupable, comment le Sénat parviendrait à établir une culpabilité toute d’intentions. La retraite inopinée du procureur général, M. Bouchez, qui se refusait à requérir contre le prévenu, transforma ce doute en émotion. Avec ce sens profond de la justice qui est en lui, le peuple français se demanda si, pour sauver la République, on n’allait pas commettre une sorte d’erreur judiciaire voulue. Ce fut Boulanger qui se chargea de le rassurer. Il prit la fuite avec Rochefort et le comte Dillon[1], impliqués comme lui dans les poursuites. Les boulangistes, atterrés, soulignèrent par leur attitude l’acte d’accusation que leur chef venait de dresser contre lui-même, et, le 4 avril, la demande en autorisation de poursuites contre Boulanger fut votée par 333 voix contre 199. Le 12 avril, la Haute Cour s’assembla et le procès commença.

    tion secrète : à la suite de cette découverte, des demandes en autorisation de poursuites furent déposées contre MM. Naquet, Turquet, Laguerre et Laisant, députés, membres du comité directeur.

  1. Boulanger se rendit à Bruxelles ; le 24 avril, sur l’invitation du gouvernement belge, il quitta la Belgique et gagna Londres, où il séjourna,