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la crise (1885-1889).

« toute une France à refaire[1] » ! Cette œuvre s’était accomplie dans le crépuscule ; l’Exposition la projeta soudain en pleine lumière.

Il advint donc que, pour avoir goûté pendant quelques mois la joie très grande et très noble de commander l’attention du monde, le citoyen français se prit à relire avec soin le bulletin de vote qu’on avait glissé dans sa main, et que, l’ayant lu, il le jeta pour en prendre un autre. Certaines désillusions, des critiques bruyantes dont quelques-unes semblaient justifiées, une sorte d’incertitude et d’hésitation dans la conduite des affaires, avaient fini par ébranler sa confiance en cet état-major républicain qu’il avait longtemps maintenu au pouvoir envers et contre tous ; il sentait maintenant que le régime sous lequel s’était préparée cette grandiose manifestation de la science et du travail ne méritait pas d’être renié un soir de victoire. Rien qu’à regarder l’ensemble de l’Exposition, la masse avait senti cela ; l’élite, en étudiant le détail, arrivait à la même conclusion. Les uns et les autres avaient constaté cette situation barométrique qui s’appelle la prospérité. Un regard jeté en arrière leur fit apercevoir la route parcourue d’une marche lente, mais continue, le progrès réalisé presque dans toutes les branches de l’activité humaine. Ils reprirent confiance en la République ; ainsi se trouva éliminé le principe morbide qui avait donné naissance au boulangisme ; il nous reste à dire comment sombra la barque qui portait Boulanger lui-même et ceux qui avaient suivi sa rapide fortune.

  1. É. Zola, la Débâcle.