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la crise (1885-1889).

C’est alors que l’opinion apprit que la France possédait des étudiants. Elle apprenait bien des choses, cette opinion légère et bavarde qui juge trop souvent les monuments sur leurs façades. Un instant elle resta étonnée et comme interdite devant les sympathies et les louanges. Elle se demanda si l’on n’était pas le jouet d’un rêve, si cette science, ce génie qui se révélaient de toutes parts, ces énergies qui montaient, ces travaux si vastes et si profonds qui venaient au jour tout à coup, si tout cela était bien réel et bien à nous.

Tels furent le sens et la portée des fêtes du centenaire. Vraisemblablement, les hommes qui s’en étaient faits les promoteurs n’avaient pas prévu cela. Ils avaient jugé utile de rappeler de grands souvenirs révolutionnaires : c’étaient cent années du passé qu’ils avaient prétendu remettre sous les regards de la France. On eut beau couler en bronze, sur les places publiques, les hommes de 1789, réunir dans les musées tout ce qui pouvait rappeler leurs exploits, répéter sur tous les tons qu’ils avaient trouvé l’axe du monde faussé, et que d’un vigoureux coup d’épaule ils l’avaient redressé pour la suite des temps ; tout cela se disait sans conviction, comme par acquit de conscience, et la foule n’écoutait pas. Tout entière à la joie de la résurrection, elle comparait la prospérité présente avec les angoisses de la veille ; elle ressentait ce « sentiment[1] de vie et de fierté que dut éprouver Lazare en remontant du tombeau ». Qu’on était loin de ce jour néfaste où les Français, vainçus, désespérés, s’étaient trouvés en face de

  1. E.-M. de Vogué, À travers l’Exposition