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la france coloniale.

des maux et épargné bien des pertes ultérieures d’hommes et de capitaux. De 1875 à 1883 ce fut une période ininterrompue de voyages et d’explorations[1], mais l’horizon s’assombrissait ; la cour de Hué se rapprochait du Tsong-Li-Yamen et envoyait à Pékin ambassades et présents. Ce fut en 1882 que le marquis Tseng fit connaître à Paris que la Chine ne regardait pas comme valable la convention de 1874 : il reçut de Gambetta une réponse nette et catégorique que M. de Freycinet renouvela peu après. « La France, dit le ministre, n’a aucune explication à fournir à la Chine. » Par malheur, le parti de la décision ne prévalait pas assez complètement ; on sentait des incertitudes, des hésitations. M. le Myre de Vilers, ayant épuisé tous les moyens de conciliation et voyant la situation s’aggraver, envoya au Tonkin le commandant Rivière qui s’empara d’Hanoï. Pendant ce temps, notre ministre à Pékin, M. Bourée, y faisait agréer un projet de traité créant une zone neutre entre la Chine et l’Annam, et contenant de la part de la France l’engagement de respecter le territoire annamite. On désavoua et l’on rappela M. Bourée : mais il eût fallu appuyer d’autant mieux le commandant Rivière qui, de nouveau, avait conquis le Delta. Les Pavillons noirs étaient des ennemis redoutables ; en France on ne les prenait pas encore au sérieux. Le 19 avril 1883, le commandant Rivière fut tué : 30 morts et 55 blessés tombèrent autour de lui.

  1. Il est à remarquer que jemais conquête lointaine ne fut mieux préparée au point de vue de la connaissance du pays : mais les récits des voyageurs laissaient en général l’opinion indifférente, en France, alors qu’en Angleterre on suivait nos progrès avec une attention jalouse et inquiète.