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la france coloniale.

occupé de sa politique continentale, voulut mettre l’Angleterre de moitié dans l’affaire qu’on lui proposait. Il y avait longtemps que les Anglais cherchaient une occasion de mettre la main sur Madagascar. En 1816, le gouverneur Farquhar avait avisé le gouverneur de Bourbon qu’il considérait Madagascar comme une dépendance de l’île de France. On l’avait désavoué, tant cette prétention était insoutenable, mais ses agissements avaient été secrètement encouragés. Lord Clarendon, à qui le gouvernement impérial entr’ouvrait ainsi la porte, envoya dans l’île le méthodiste Ellis qui organisa ces missions britanniques où, sous prétexte de propagande religieuse, s’exerça l’action anti-française. Le missionnaire Pickersgill (1877-1881) lui succéda. L’heure était venue d’agir ou d’évacuer. En 1883, l’amiral Pierre s’empara de Majunga et de Tamatave ; l’année suivante l’amiral Miot mit le blocus sur les côtes, cependant que l’amirai Galiber, puis M. Patrimonio menaient avec les Hovas des négociations laborieuses. Les Anglais entretenaient ces derniers dans l’illusion que l’Europe leur était favorable[1] ; aussi rompaient-ils d’eux-mêmes les pourparlers dès qu’ils entrevoyaient la possibilité d’une crise ministérielle en France ou d’un refus par le Parlement des crédits demandés par le gouvernement. Enfin un traité fut signé qui nous cédait la baie de Diégo-Suarez et établissait notre protectorat. L’Angleterre en a reconnu les clauses en 1891 ; mais pour vaincre les dernières résis-

  1. En 1882 le gouvernement Hova avait envoyé à Paris son ministre des affaires étrangères. Ce fonctionnaire, trompé sur l’attitude des autres puissances et croyant exécuter un coup de théâtre retentissant, rompit brusquement les négociations et partit un soir pour Berlin ; il eut le regret et la surprise de s’y voir éconduit.