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le ministère jules ferry.

La question ouvrière servait aussi de terrain de combat. Au début de 1884, les propositions tendant « à améliorer le sort des travailleurs » se succédèrent avec une incroyable fécondité. On affectait de croire à une crise générale qui paralysait le commerce et l’industrie ; et, précisément, les derniers mois de 1883 avaient été marqués par une sorte de reprise des affaires[1]. Mutualité, socialisme chrétien ou athée, réforme de l’impôt, protectionnisme, tout fut discuté. Jules Ferry défendait la liberté du travail. « Nous estimons, disait-il, qu’il n’y a de réformes sociales profondes que celles qui commencent par la réforme des idées et des mœurs et qui ont leur source dans l’activité, l’initiative et la prévoyance individuelles. Alors, quel est le rôle de l’État ? Est-ce de se substituer à l’initiative, à la prévoyance individuelles ? Non, c’est d’encourager, d’aider, de subventionner, s’il le faut, leur développement ; jamais de se substituer à elles. » Tous ces obstacles n’entravaient pas le travail législatif ; il s’accomplissait avec plus de rapidité que sous d’autres ministères moins combattus, tant une volonté ferme et une ligne de conduite déterminée facilitent le bon fonctionnement gouvernemental. La loi municipale fut promulguée le 5 avril[2] ; il y eut encore d’importantes discussions sur l’enseignement primaire ; on vota des lois sur la libération condi-

  1. Cette reprise, il est juste de le dire, ne dura guère : il fallut un peu plus tard consentir un emprunt de 350 millions qui fut couvert 3 fois 1/4 seulement.
  2. Elle renfermait une clause de portée considérable dont assurément il n’a pas encore été tiré très grand profit, mais qui n’en contient pas moins le germe d’une révolution bienfaisante : la faculté laissée aux communes d’un même canton de réunir leurs efforts pour des entreprises à frais communs, dans l’intérêt public.