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avant-propos.

apparurent à plus d’un esprit droit, égaré par la frayeur, comme une nécessité douloureuse[1]. Il fallut du temps pour qu’on s’aperçût de leur inutilité réelle et que le caractère attentatoire du Deux-Décembre se manifestât au grand jour. La peur ne saurait fonder rien de solide ni de durable, et comme, après tout, Napoléon iii n’était pas un tyran, les institutions impériales furent vite ébranlées par les infiltrations libérales ; on dut les couvrir d’une couche de parlementarisme, afin de les consolider. L’Empereur, privé de conseillers sans scrupule, retourna de lui-même aux suggestions de son passé révolutionnaire.

La République apparaissait de nouveau comme le terme fatal[2] ; on ne pouvait prévoir cependant que le trône s’écroulerait, non pas dans l’inoffensive effervescence d’une révolte populaire, mais sur un champ de bataille où la France, seule, sans ressources, se trouverait aux prises avec un ennemi redoutable et résolu.

Il faudrait faire précéder l’histoire de la troisième République d’une étude sur la société du second Empire, sur ceux qui formèrent la « classe dirigeante » de

  1. 27.764 citoyens passèrent devant les Commissions mixtes après le 2 décembre. 247 passèrent en conseil de guerre et 626 en police correctionnelle ; 239 furent déportés à Cayenne, 9.563 en Algérie ; 959 furent expulsés ; 636 « éloignés » et 2.818 internés. (Statistique publiée à l’occasion du vote de six millions pour pensions viagères aux victimes du coup d’État. Mars 1881.)
  2. « Les seules révolutions qui réussissent sont celles qui sont faites d’avance dans les cœurs et dans les esprits et sont commandées par la logique de l’histoire. » (E. de Pressensé.)