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la tunisie et l’égypte.

gleterre. On eût compris, en Europe, notre abstention aussi bien que notre action ; il y avait de sérieux motifs pour agir, et il y en avait d’aussi sérieux pour s’abstenir. Ce qui causa de la surprise, voire même de l’inquiétude, car on y vit la preuve que le gouvernement français se désagrégeait, ce furent l’indécision, les demi-mesures, les violences de langage que ne suivait aucun acte énergique et surtout cette mauvaise humeur de l’opinion, ces incartades d’enfant gâté par lesquelles on se dédommageait des déceptions éprouvées. Le bilan des affaires intérieures pendant cette année 1882 n’était pas de nature à relever la confiance.

Les Français, encore peu habitués à la pratique d’un régime impersonnel et enclins à croire aux hommes providentiels, s’étaient accoutumés à cette idée que Gambetta tenait en réserve pour eux de merveilleux progrès, des réformes admirables, et que tous les sourires de la fortune étaient sur lui. Les élections législatives de 1881 avaient contribué à accentuer cette impression ; préparées et accomplies par Jules Ferry, elles étaient, aux yeux de tous, le prélude de l’arrivée de Gambetta au pouvoir, et lorsqu’on sut que la République y gagnait cinquante-trois sièges, on sut en même temps que le ministère Gambetta était fait.

Le président de la Chambre, de son côté, se préparait au rôle auquel il se sentait appelé ; il avait de plus en plus les allures d’un chef de parti sur lequel pèsent déjà les responsabilités prochaines du pouvoir. La sagesse et la raison se mêlaient dans ses discours à ces élans superbes du cœur qui lui faisaient traduire, en son hardi langage,