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la tunisie et l’égypte.

dictatorial. La Porte entra alors en scène et envoya en Égypte une commission officielle chargée de rétablir l’ordre : Dervish-Pasha en était le chef. C’était presque une solution ; c’était du moins un parti et peut-être le meilleur : provoquer l’intervention de la Turquie et la soutenir[1]. Mais M. de Freycinet préféra recourir, dans son désir d’éviter des complications, à cet expédient si usé qu’il équivalait presque à un aveu d’impuissance, la réunion d’une conférence internationale. C’était un procédé approprié aux lenteurs ottomanes ; cependant le Sultan ne désigna pas de représentants. Il n’admettait plus l’ingérence de l’Europe dans sa querelle avec un vassal et prétendait la régler à lui tout seul. La conférence s’ouvrit à Constantinople le 23 juin. Mais, depuis le jour où elle avait été convoquée, un événement terrible et imprévu avait changé la face des choses. Le 10 juin, quatre jours après que Dervish-Pacha avait pris pied sur le sol d’Égypte, le massacre de trois cents Européens avait ensanglanté Alexandrie, et l’Angleterre, sortie de son irrésolution, décidée maintenant à intervenir, faisait ses préparatifs de combat. Le 11 juillet, pendant qu’à Constantinople les plénipotentiaires délibéraient pacifiquement sous la présidence du comte Corti, ambassadeur d’Italie, l’amiral Seymour commença le bombardement d’Alexandrie. L’ami-

  1. M. Delafosse l’indique à la Chambre le 1er juin : mais le gouvernement semblait n’avoir sur ce point aucun plan, ni aucune idée. Au cours de la discussion, M. de Freycinet laissa échapper des paroles imprudentes qui témoigneront d’une trop vive anxiété de ne pas s’exposer à des complications. « Vous venez, s’écria Gambetta, de livrer à l’Europe le secret de vos faiblesses : désormais il suffira de vous intimider pour vous faire tout consentir ! » La publication des Livres bleus anglais a corroboré, il faut l’avouer, tout ce qu’on avait soupçonné de l’esprit d’indécision dont le gouvernement fit preuve pendant cette période.