Page:Coubertin - L Evolution Francaise sous la Troisième République, 1896.djvu/144

Cette page n’a pas encore été corrigée
123
la tunisie et l’égypte.

et c’est une entreprise privée due au génie et aux capitaux français, le percement de l’isthme de Suez, qui a paru devoir consacrer définitivement l’amitié des deux pays. Une seule fois, la France est intervenue dans une pensée de pure politique ; en 1841, lors de la convention dite des Détroits, qui assura le trône khédivial aux descendants de Méhémet-Ali. On peut dire que nos intérêts en Égypte sont des intérêts d’un caractère spécial ; la gloire d’un illustre capitaine, les travaux de nombreux savants, l’entreprise géniale d’un grand citoyen nous y ont attirés et nous y retiennent ; ce sont là des motifs puissants, moins puissants néanmoins que ces obligations d’ordre purement matériel, résultant de la présence sur une terre lointaine de colons qui défrichent et mettent en valeur un sol vierge et comptent sur la protection de la mère patrie, en cas de péril. On comprend donc que la France ait eu, à l’égard de l’Égypte, une politique de sentiment et une politique de raisonnement, et qu’à un moment donné ces deux politiques se soient trouvées en opposition. Si l’absence de jugement et de sens pratique dont le gouvernement et l’opinion donnèrent les preuves en cette circonstance, doit être excusée, ce ne peut être qu’en considération de cette dualité d’intérêts.

Les dilapidations du khédive Ismaïl, les difficultés financières qui allaient s’aggravant chaque jour avaient provoqué, en 1876, l’unification de la dette égyptienne et l’établissement du contrôle étranger. Or, en 1878, le gouvernement égyptien s’était trouvé hors d’état de remplir ses engagements. M. Waddington, jugeant que les circonstances n’autorisaient pas la France à intervenir seule, avait alors