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et le congrès de berlin.

Il n’est pas inutile de jeter un rapide coup d’œil sur l’état de l’Europe au lendemain du Congrès de Berlin. Il advient qu’à certains tournants de siècle, les nations se rencontrent comme des promeneurs dans un jardin ; c’est alors que les groupements se reforment, et pendant un moment toutes les combinaisons deviennent possibles. Tel était le cas pour l’Europe de 1879.

En Allemagne, M. de Bismarck poursuivait la série de ses évolutions. Jusqu’en 1866 il s’était associé aux conservateurs pour parfaire la puissance militaire de la Prusse ; après 1866 il avait fait alliance avec la démocratie et établi le suffrage universel afin d’avoir à sa portée une opinion véritablement nationale à qui faire appel au besoin. De 1870 à 1878 il avait gouverné avec le parti libéral contre les ultramontains ; il se rapprochait de ceux-ci maintenant en vue de faire triompher sa politique économique et de lutter contre le socialisme. Les résistances du Reichstag lui réservaient une suite d’étonnements et de déboires. Après l’alerte de 1875, il s’était fait soudain à l’idée d’une France de première grandeur continuant à figurer dans la

    de désappointement dans tout ce pays. » En effet, non seulement la mission Thomassin n’était pas partie, sous prétexte que le gouvernement allemand fournissait, dans le même temps, des officiers à la Turquie et qu’il pouvait y avoir froissement ; mais la Grèce ayant demandé à acheter du matériel d’armement, M. de Freycinet avait fait connaître à son collègue de la guerre (lettre confidentielle du 27 juillet 1880) « qu’en raison des interprétations auxquelles cet acte pourrait donner lieu, en ce moment, le Président de la République et le conseil des ministres pensaient qu’il était préférable de s’abstenir ». On apprit dans la suite que des entrepreneurs soldés par la Grèce faisaient, dans nos arsenaux, des achats de matériel de rebut ; le gouvernement résilia les ventes et arrêta les navires en partance. Tout cet incident est significatif en ce qu’il témoigne d’un souci de sauvegarder la paix qui, très louable dans les grandes choses, devenait, lorsqu’il s’agissait de détails aussi secondaires, très exagéré et risquait presque de compromettre la dignité nationale.