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l’alerte de 1875

Ferry de l’avoir recherchée ; peut-être, en effet, séduisit-elle, à un moment, l’âme du grand patriote ; elle eût refait très rapidement la fortune de la France en même temps qu’assuré le repos à l’Europe ; c’était une œuvre d’une délicatesse audacieuse, exigeant la confiance absolue de la nation dans l’homme qui eût osé l’entreprendre ; il va de soi qu’elle supposait la revision du traité de Francfort.

Des problèmes d’un ordre moins élevé se sont imposés en même temps à ceux qui ont travaillé à nous refaire une diplomatie ; il a fallu trouver des hommes susceptibles de représenter la République dans les cours européennes sans avoir à les chercher parmi les adversaires du régime ; il a fallu, d’autre patt, concilier la politique de laïcisation pratiquée à l’intérieur avec la protection des intérêts catholiques intimement liés, au dehors, à nos intérêts nationaux. Bien que le télégraphe, les chemins de fer et le progrès des idées démocratiques aient modifié les conditions dans lesquelles elle s’exerce, l’action diplomatique, telle qu’elle est pratiquée en Europe, demeure une question de personnes. Le choix de l’ambassadeur, sa position sociale, son tact, les qualités de son esprit décident de l’accueil qui lui est fait, et aussi la personne du souverain dont il est l’envoyé, du ministre dont il représente les idées. La Suisse et les États-Unis font exception, sans doute ; mais peut-on les comparer à la France qui a un si long passé monarchique, des frontières si étendues et tant de points de contact avec les États qui l’entourent ? Les diplomates des autres pays représentent tous des hommes, non des institutions. L’effacement de l’homme devant l’institution qui est le dogme fondamental de la