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magne les conséquences de cet événement, et nous verrons en face de quelles alternatives il placera la Russie. Le rôle de la Hongrie est plus difficile à déterminer ; il dépendra, pour une large part, des circonstances ; mais il ne saurait être insignifiant. Pour être prêts à le remplir, il semble que les Magyars ne puissent mieux faire que de compléter fortement leur organisation intérieure, de resserrer les liens qui les unissent à l’Allemagne et de desserrer ceux qui les unissent à la Croatie. Ce serait là, pour eux, une politique d’avenir.

Une chose, en tout cas, est certaine : c’est qu’ici toute application du système fédéral donnerait des résultats désastreux. En théorie, cette solution des difficultés austro-hongroises est si séduisante que de bons esprits sont excusables de l’avoir prônée. Il suffit pourtant d’un coup d’œil donné à certains districts de la Transylvanie et de la Bukovine, par exemple, pour en faire toucher du doigt l’absolu néant…

Restent les Tchèques. Leur droit est éclatant, leur volonté manifeste. Ils doivent être les maîtres chez eux. C’est à l’Allemagne à le comprendre ; sa sécurité l’exige non moins que son bon renom ; ce serait au besoin à l’Europe à le lui rappeler et peut-être une neutralité garantie par l’accord des puissances constituerait-elle la meilleure solution ; toutefois, ne nous payons pas d’illusions. L’intervention européenne sera toujours tempérée par ce fait que presque de tous côtés les Tchèques sont entourés par l’Allemagne ou ses alliés certains : fait regrettable, mais contre lequel on ne peut rien et qui place le royaume de saint Wenceslas dans une sorte de dépendance morale de ces Germains qu’imprudemment les princes de la dynastie Premysl appelaient jadis en Bohême pour perfectionner l’agriculture et développer l’industrie.