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où il y a parfois de rapides décisions à prendre, des dangers même à courir, des responsabilités engagées et qui nécessitent autant de vivacité dans la réflexion que de sang-froid dans l’exécution. Pour bien comprendre la différence, je vous demanderai de ne pas considérer seulement l’adolescent, mais aussi l’enfant et l’homme. Ne font-ils pas du sport à leur manière, ces petits audacieux qui escaladent les murs et sautent les ruisseaux ? La chute ou le bain forcé qui les menacent ne sont pour eux qu’un charme de plus ; souvent leurs aînés accomplissent un haut fait du même genre ou soutiennent jusqu’au bout un effort violent, parce qu’il y a là quelqu’un à qui ils veulent montrer leur force, mais les enfants ne s’inquiètent pas si on les regarde : ils prennent un plaisir extrême à vaincre une difficulté naturelle et plus l’obstacle est grand, plus est grande aussi leur satisfaction de l’avoir franchi. C’est un peu le même sentiment qui, à l’autre bout de l’échelle, guide les sauveteurs, les explorateurs, les missionnaires, tous ceux qui, partis de très bas, arrivent très haut, tous ceux qui aiment l’assaut, la mêlée, le corps-à-corps ; l’enjeu est humain ou divin, le mobile est matériel ou moral, il s’agit de gloire ou d’argent : qu’importe ! tout cela, c’est du sport ; dites-moi donc si ces sportsmen-là ne sont pas intelligents ?

Transporté dans le domaine de l’éducation, l’athlétisme dont je viens de vous retracer à grands traits les principes soulève deux objections : la première, c’est qu’il ne convient pas à toutes les natures, et la seconde, c’est qu’il engendre la brutalité. Il y a en effet des enfants maladifs pour lesquels l’éducation athlétique ne vaut rien ; mais ceux-là ne doivent pas aller au collège ; si l’on veut aigrir leur caractère, donner à toute leur existence un arrière-goût d’amertume, en faire des ratés, il n’est pas de plus sûr moyen que de les mêler à d’autres enfants. Je n’ai donc pas à m’occuper de ceux-là. Restent ces natures un peu faibles, un peu timides, sur les-