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une précieuse garde-frontière, le pays se trouvait entraîné d’autre part dans une série de fâcheuses complications. Sigismond s’étant avisé de faire valoir des droits au trône de Suède, d’interminables hostilités en résultèrent entre les deux peuples : luttes stériles auxquelles les Russes ne pouvaient manquer de prendre part.

Le vrai péril de la Pologne, ce furent les tsars Ivan IV et Pierre le grand qui l’instituèrent : le premier en autocratisant la Russie et le second en la tournant de force vers l’occident. Ce sera pour les historiens à venir une passionnante étude de déterminer s’ils ne firent pas ainsi le malheur de l’Europe et de la Russie elle-même.

Le règne d’Ivan IV (1533-1584) est loin de présenter l’unité qu’on lui suppose volontiers. À vrai dire ce prince manifesta les violences propres aux alcooliques. Un moment vers 1570, il avait semblé se décourager, faisant demander à la reine Élisabeth un asile éventuel en Angleterre. Il conduisait alors une curieuse expérience dont l’idée témoigne de son imagination fertile. Ne pouvant encore mater la douma ou assemblée des seigneurs (boïars), il lui avait abandonné l’administration d’une partie du territoire, se réservant d’y intervenir seulement pour « punir la trahison ». L’autre portion serait gouvernée directement par lui-même et selon la formule autocratique. La douma à ce moment n’avait point de chef de valeur et ne pouvait guère organiser que l’anarchie. De plus la clause de trahison permettait à Ivan de supprimer les opposants et il ne s’en priva point.

Il subsistait çà et là de redoutables foyers d’opposition. La république de Novgorod n’avait disparu que nominalement ; son esprit vivait toujours ; à ce point que des moscovites transplantés devenaient des novgorodiens « à tendances républicaines, à sympathies marquées pour les institutions allemandes ou polonaises ». Pskof était à cet égard le « frère cadet » de Novgorod. Ivan procéda par irruptions brutales ; des exécutions, de brèves et sanglantes assises, quelques ukases impitoyables…

    en « cercles » que commandaient leurs « atamans » les Cosaques que le gouvernement de Moscou ne pouvait réduire, lui servirent à protéger les frontières. Leur centre fut la région du Don. Ils agrandirent peu à peu leurs domaines en refoulant les asiatiques et devinrent fort redoutables par leurs exigences et leurs fréquentes révoltes.