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le partage de la pologne

Or, après quatre mois de séjour sur les bords de la Vistule, Henri apprenant que la couronne de France venait de lui échoir et ravi de la pouvoir échanger contre celle de Pologne, s’était enfui de chez ses sujets slaves en se cachant pour n’être point retenu par eux. Alors s’étaient succédés sur le trône abandonné : Étienne Bathory, prince de Transylvanie (1574-1586) puis trois représentants d’une branche catholique des Vasa de Suède : Sigismond III (1587-1631), son fils Ladislas IV (1631-1648) et le frère de celui-ci Jean-Casimir (1648-1669) enfin Jean Sobieski l’illustre vainqueur des Turcs élu en 1674. Ces princes de rencontre — et sauf le dernier — de sang étranger eurent des règnes normaux comme durée et n’auraient pas tous été de mauvais gouvernants s’ils avaient pu faire abstraction de leur passé, de leurs nationalités d’origine et aussi des conditions dans lesquelles s’opérait désormais l’élection tumultueuse de chaque souverain. L’assemblée qui y procédait, adonnée aux festivités et aux intrigues, faussait dès le principe l’axe du règne. À ce moment de son histoire, ce fut bien la monarchie qui perdit la Pologne. Constituée en véritable république fédérative, il est probable que, malgré les faiblesses inhérentes à pareil régime, elle eût mieux résisté. Avec la ressource de la dictature temporaire à la romaine en cas de péril national, elle se fut ressaisie périodiquement comme si souvent déjà elle s’en était montrée capable. Sous bien des rapports l’État polonais avait été novateur. Le paysan soumis ailleurs à un dur servage avait bénéficié au dedans de ses frontières, d’une émancipation relative. La tolérance religieuse s’était de bonne heure manifestée et l’on avait vu ariens, sociniens, luthériens, orthodoxes — et même les juifs persécutés dans les autres pays — trouver là un asile. En 1573 la diète avait encore confirmé solennellement ces vieilles traditions libérales mais, à l’heure même où elles recevaient une nouvelle consécration verbale, on commençait à les délaisser pratiquement. Sigismond III, antislave et sectaire favorisa l’action des jésuites qui visaient à animer la jeune Pologne contre l’orthodoxie voisine. Et tandis que l’on préparait ainsi la révolte des Ukrainiens fort attachés à leur foi et d’autant plus à ménager que leurs cosaques[1] constituaient à la Pologne

  1. Le terme cosaque d’origine asiatique semble avoir été employé pour la première fois en Russie, vers la fin du xve siècle, et avoir servi à désigner les cavaliers semi-nomades qui vivaient de pillage et qu’allaient souvent rejoindre des moscovites fuyant les impôts et aspirant à la vie de la steppe. Organisés