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attendu s’assemble à Trente (1545) sous le pontificat de Paul III. On a perdu beaucoup de temps à le convoquer ; on va en perdre non moins à délibérer. Transféré à Bologne en 1547, dissous en 1549, rouvert par Jules III en 1551, suspendu en 1552, repris en 1562, clos enfin en 1564 jamais concile n’a eu ou n’aura une existence si agitée et si complexe.

Si l’initiative de Luther a créé le protestantisme, le concile de Trente a créé le catholicisme. De part et d’autre, il y a « caporalisation » du christianisme selon des modes différents. Et comme, par comparaison, cette Église du moyen-âge qu’on se figure étroite et mesquine apparaît au contraire « large d’allures et souple » ! À prendre la liste des décisions arrêtées, il n’y a point de si grands changements dans le camp romain. Les innovations de doctrine sont peu nombreuses et quelques unes des mesures prises concernant la publicité des mariages, par exemple, sont de nature à servir l’ordre public ; mais un esprit nouveau anime la législation, une sorte d’esprit militaire fait d’aspirations combatives et disciplinaires et qu’accentue encore la création de la milice d’origine espagnole en laquelle le concile va trouver un agent d’exécution, à savoir l’ordre des jésuites.

Son fondateur, Ignace de Loyola (1491-1556) est un militaire en effet, enthousiaste et énergique. Il n’abandonne la carrière des armes que pour conquérir des âmes. À trente-sept ans, il recommence ses études, passe son doctorat à l’université de Paris (1534) et dans une chapelle de Montmartre avec quelques jeunes gens dont l’« intrépide et élégant François Xavier », il fonde la « Société de Jésus ». Son but sera de servir d’appui à la papauté. Ignace qui ignore son génie d’organisateur vise à n’être qu’une soixantaine. Quand il mourra, la Société sera déjà divisée en quatorze provinces. Le « général » dirige depuis Rome surveillé par six « assistants » qu’élisent les jésuites d’Allemagne, de France, d’Espagne, de Portugal, d’Italie et de Pologne. Progrès d’une rapidité inouïe : en quinze ans les jésuites se sont établis à Cologne, à Munich, à Vienne, à Trèves, à Mayence ; plus tard à Anvers, à Louvain, à Prague, à Fribourg, à Lucerne. Comment ils se forment ?… Au moyen d’un noviciat formidable et d’une longueur inusitée au cours duquel l’individualité est brisée puis reconstruite. Car c’est une erreur communément admise de croire que le jésuite n’est qu’un instrument passif aux mains de ses supérieurs. Peu d’ordres au contraire préservent pareillement l’autonomie de chacun de ses membres mais après l’avoir enfermée dans des directives à la fois vastes et courtes. En politique ils