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encore sans que la situation se détendit. Enfin le 19 avril 1775, jour mémorable, les troupes par lesquelles l’Angleterre avait commis l’imprudence de faire occuper Boston entrèrent en collision à Lexington avec un bataillon américain. Elles furent repoussées. Dès lors la séparation était faite. Le 10 mai, le congrès de Philadelphie décréta la levée générale et appela George Washington au commandement suprême.

Cette nouvelle guerre dura six ans (1775-1781). Les Anglais affectant de tenir leurs adversaires pour des insurgés et non des belligérants s’en prévalurent pour leur refuser les garanties habituelles du droit des gens. Ils les traitèrent de façon barbare. Mais ils avaient à faire à forte partie[1]. De toutes les difficultés rencontrées par les Américains, l’absence de crédit était la pire. La monnaie émise par eux baissant indéfiniment, le coût de la vie haussa en proportion. Un jour vint où une paire de chaussures valut quatre cents dollars. C’est en quoi l’intervention française leur fut le plus efficace. Au début, l’élan de Lafayette et de ses compagnons leur avait apporté un appui moral et technique mais l’alliance officielle du roi de France pouvait seule inspirer à l’Europe confiance en leur avenir. Sans aide ils fussent sortis vainqueurs mais ruinés d’une lutte épuisante. La participation des troupes françaises à la capitulation de Yorktown hâta la paix. C’était là un bienfait précieux car, ce grand pays une fois émancipé, il fallait maintenant l’organiser ; la chose ne serait point aisée.

On dut s’y reprendre à deux fois. La première constitution rédigée par des députés sans autorité n’aboutit qu’à une prompte anarchie. Chacune des colonies devenues États se montrait

  1. L’agent secret envoyé en 1775 par le gouvernement français et qui parcourut les États-Unis déguisé en marchand disait dans son rapport daté de Philadelphie : « Chacun ici est soldat. Les troupes sont bien habillées et bien commandées. Ils ont à peu près cinquante mille hommes de troupes payées et un grand nombre de volontaires qui refusent de l’être ». L’Angleterre commença par opposer des mercenaires loués aux divers princes allemands : Hesse, Brunswick, Anhalt, Anspach Frédéric II de Prusse qui n’aimait point cette façon de faire la guerre préleva le droit sur les bestiaux pour chacun des hommes ainsi enrôlés qui eut à traverser ses États. Frédéric s’intéressait beaucoup à l’aventure américaine. Il la suivit attentivement et considéra les campagnes de Washington et notamment les batailles de Trenton et de Princeton comme des faits d’armes remarquables.