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royaume de Naples n’étaient susceptibles d’orienter la politique à leur gré ; et le trône pontifical allait être occupé pendant dix-huit ans (1740-1758) par un pape libéral et conciliant, Benoît xiv. Dès lors la France en jouant le rôle d’arbitre pouvait travailler à concilier les intérêts et à opposer les ambitions. Notamment il était loisible à sa diplomatie de s’employer à maintenir au centre de l’Europe entre Autrichiens et Prussiens un équilibre utile à la paix générale. On s’attendait généralement à lui voir assumer pareille fonction. Certes la régence du duc d’Orléans (1715-1723) n’avait pas beaucoup ajouté à son autorité morale encore que ce prince ne fut ni sans valeur mentale ni sans bravoure personnelle. Mais une fois émancipé, Louis XV avait fait appel à son ancien précepteur le cardinal Fleury envers qui les historiens se sont montrés volontiers injustes. L’ambassadeur de Russie écrivant à son gouvernement, disait de lui : « Il ne songe qu’aux intérêts français ». C’est le meilleur éloge. Par malheur le cardinal était âgé et isolé. De plus l’année avant qu’il accédât au pouvoir (1726) avait été célébré le mariage de Louis XV avec Marie Leczinska, fille du roi dépossédé de Pologne et de six ans son aînée : mariage dû à des intrigues de cour et déraisonnable à tous égards car il en devait résulter des germes de guerre contre le développement desquels Fleury lutta pendant la Première partie de son ministère mais qu’ensuite il ne réussit pas à neutraliser. À partir du rétablissement de Stanislas Leczinski sur le trône de Pologne, la situation arbitrale de la France commença d’être compromise ; et en 1741 elle entrait en guerre contre l’Autriche sur un triple théâtre, en Allemagne, en Italie, en Belgique. Lorsque sept ans plus tard fut conclue la paix d’Aix-la-Chapelle (1748) il se trouva que les Français, après avoir eu à porter le principal fardeau d’une lutte si longue n’en retiraient aucun bénéfice. Les grands se congratulèrent de leurs faits d’armes mais le peuple apprécia différemment les choses. « Bête comme la paix » fut le dicton à la mode cette année-là. Fleury était mort dès 1743 et Louis XV l’avait remplacé par ses favorites, la duchesse de Châteauroux puis madame de Pompadour lesquelles à la différence de ce qui s’était passé sous Louis XIV furent admises à diriger l’État et à décider des alliances et des conflits.

Ces dames ne connaissaient point les choses d’Asie ou d’Amérique. Le roi qui joignait la paresse à ses autres qualités n’en savait guère davantage. Voltaire non plus du reste puisque le Canada ne représentait à ses yeux que « quelques arpents de