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la police étaient tombées sous leur dépendance. Mais cela ne pouvait durer. Des cités comme Milan qui approchait du chiffre de trois cent mille habitants devaient en arriver à réclamer le contrôle de leurs affaires d’autant que, là comme dans d’autres localités moins peuplées, le progrès du commerce avait fait naître des corporations qui, d’abord protégées et encouragées par l’évêque, ne tardèrent pas à entrer en conflit avec lui. Le prestige de celui-ci du reste était en fonction du prestige de la papauté. Or la papauté comme nous l’avons dit ailleurs, traversait une crise lamentable. Toutes sortes de scandales l’avaient affaiblie. Rome était déchirée par les factions. Des seigneurs avaient bâti leurs tours crénelées au milieu des temples antiques qu’ils achevaient de détruire. C’étaient dans les rues d’incessantes batailles. Les autres villes du patrimoine pontifical n’étaient guère mieux partagées. Le Saint-siège ne s’en faisait obéir que de façon très intermittente par l’envoi de « légats » plénipotentiaires brandissant la seule arme qui fut à sa disposition, l’excommunication : arme toujours redoutée mais dont pourtant il ne fallait pas abuser sous peine de l’émousser rapidement. La situation juridique des États de l’Église n’était pas claire. Relevaient-ils, en dernière instance, de l’empire ? À quel titre le pape y dominait-il ? En était-il propriétaire ou usufruitier ? À Bénévent, ancien duché lombard émancipé, les Byzantins avaient repris pied et ils prétendaient à la possession recouvrée de l’ancienne grande-Grèce moins la Sicile que détenaient les Arabes. En Toscane les souverains de lignée mi-germanique se trouvaient aux prises avec la même effervescence municipale. Quant aux républiques maritimes, Venise, Gênes, Pise, principalement préoccupées de leurs intérêts commerciaux, elles se tenaient volontiers en dehors des querelles italiennes.

Certes il n’était pas commode de gouverner de pareils États. Othon II (972-983) en fit la prompte expérience et, comme s’il n’avait point assez des difficultés à surmonter en Allemagne et en Italie, il en vit surgir avec la France. Le roi Lothaire ayant voulu reprendre la Lorraine, Othon ravagea les provinces françaises de l’est et s’en vint camper à Montmartre (978) mais il ne chercha pas à pousser plus loin une aventure dangereuse. Sa femme Théophano était une princesse byzantine dont son père avait eu grand’ peine à obtenir pour lui l’alliance. Une