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pauvre. Faisons la part de l’exagération. De telles remarques n’en sont pas moins suggestives.

Comment s’étonner dès lors de l’élan avec lequel le celtisme épousa les idées et les habitudes romaines ou de l’absence d’originalité créatrice qu’entraîna pour lui la persistance de cet élan. Une activité intense dans les écoles et dans les centres intellectuels tels qu’Autun, Poitiers, Toulouse, Bordeaux, Arles… une production incessante des chantiers où des ateliers d’art n’aboutirent à aucune expression nouvelle dans le domaine de la pensée ou dans celui de la beauté. Des rhéteurs et des écrivains de Gaule purent atteindre une renommée mondiale, des édifices nombreux s’élever de toutes parts, la verrerie, l’orfèvrerie ou les objets plaqués parvenir à une perfection que Pline proclamait avec admiration il n’en résulta ni formes littéraires, ni aspects architecturaux, ni motifs décoratifs différents de ce qu’avait inspiré ailleurs le génie romain.

L’âme celte n’en était pas moins vivante. Attendant au fond d’elle-même le jour où elle concevrait la cathédrale gothique et la chanson de geste, elle prenait en silence des leçons d’ordre, de mesure et de maîtrise de soi.


LA POUSSÉE FRANQUE ET SON ÉCHEC

À la fin du iiime siècle, il fut commis en Gaule des fautes irréparables. Cent ans plus tôt on avait réduit de près de moitié les effectifs des troupes de la frontière. C’était une imprudence inspirée à la fois par le sentiment de la sécurité présente et par le désir d’économiser les deniers publics. Lorsque la ligne de défense se trouva rompue — et nous avons vu qu’elle le fût en 275 par les Germains qui dévastèrent tout le nord du pays — les envahisseurs, une fois cette ligne franchie, purent exercer librement leurs ravages, nulle défense d’arrière n’ayant été prévue. Le rétablissement de la frontière et la reconstitution des anciens effectifs celtes s’imposaient alors. Au lieu de cela on se mit à fortifier les villes de l’intérieur ; on y installa de petites