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l’europe à la fin du xve siècle

la sainte. Ivan ayant épousé Sophie Paléologue en vint, après la chute de Byzance, à se considérer comme l’héritier et le vengeur des empereurs. Il adopta l’aigle à deux têtes, leur emblème ; l’église orthodoxe poussa dans le sol russe des racines de plus en plus ramifiées et tenaces.

iii

Vide et dépourvue d’intérêt même anecdotique se déroule l’histoire de l’Angleterre depuis la fin de la guerre de cent ans jusqu’à l’avènement d’Henri VIII (1453-1509). Des factions rivales s’entredéchirent au nom de deux maisons qui prétendent au trône : York et Lancastre. Leurs armoiries sont une rose blanche et une rose rouge ; de là ce nom ironique de guerre des Deux roses qui recouvre une série de crimes et de perfidies vulgaires. Un seul résultat de quelque portée : la haute noblesse en sort tout à fait affaiblie tandis qu’une certaine prospérité se développe dans les rangs de la bourgeoisie. L’agriculture pourtant a beaucoup souffert mais l’industrie du tissage de la laine progresse fortement. Vers la fin du règne d’Édouard IV (1461-1483) quelques signes d’élémentaire « confort » commencent d’apparaître dans la vie privée. Le niveau intellectuel et moral de la nation n’en est pas relevé pour cela ; il est alors au plus bas ; les mœurs sont déplorables, la grossièreté générale. Henri VII (1485-1509) est un homme d’affaires, expert, méfiant et résolu qui sait observer et conclure. Ses droits au trône étant contestables, il les fait tout simplement confirmer par le Parlement. La Chambre des lords n’est plus en état de lui résister. Les Communes lui sont favorables. Il négocie des traités de commerce avec les Flandres, avec la Norvège, même avec Florence. Les Anglais approuvent. Une seule chose les intéresse dès lors : gagner de l’argent. Si la haine de la France reste vivace chez eux, c’est la « bonne affaire » manquée dont le souvenir les irrite. Et on ne récidive pas malgré l’envie qu’on en a de crainte précisément que, cette fois-ci, l’affaire n’ait plus aucune chance d’être bonne.

En Écosse la sauvage insubordination des grands entrave tous les efforts des rois Stuart pour affiner le pays. L’Irlande continue à parler celte et son âme qu’on n’a pas su conquérir se rétracte. Elle rêve et chante. Vers le milieu du xvme siècle, une irlandaise qui se piquait de protéger les lettres et était en même temps zélée patriote s’est avisée de convier à un repas les poètes