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forgèrent des généalogies propres à démontrer que les fondateurs de la ville et les rois achéménides descendaient d’une même souche. En effet, ils étaient aryens, les uns et les autres mais, alors, on ne pouvait le savoir et, du reste, c’étaient quand même deux formules de civilisation inégales et opposées qui allaient se heurter. L’or perse abondamment répandu par les émissaires du « Grand roi », avec accompagnement de paroles habiles, acheva de désagréger une opinion déjà divisée. Il n’est pas jusqu’à l’oracle de Delphes qui ne se soit laissé influencer et dont la demi-défaillance n’ait encouragé les « défaitistes ». L’imminence même du danger ne parvint point à dessiller les yeux. Hérodote a laissé un tragique récit du conseil de guerre nocturne qui précéda la journée de Salamine. Les délégués de Corinthe voulaient qu’on se retirât dans l’isthme. Sparte n’avait envoyé que seize trirèmes en plus des trois cents soldats qui, chargés de garder le défilé des Thermopyles, venaient de s’y faire bravement massacrer avec leur chef Léonidas. Elle exerçait néanmoins la présidence des débats. Son représentant menaça Thémistocle de son bâton. Mais Thémistocle tint bon. Athènes avait consenti le plus beau des sacrifices. La ville avait été évacuée ; les femmes et les enfants transportés à Trézène, tous les hommes, vieux navigateurs ou marins novices, s’étaient retirés sur la flotte pour combattre. Thémistocle l’emporta et l’aube du 20 septembre 480 se leva. Xerxès sur le rivage assista au carnage, à l’anéantissement de sa flotte. Sa rage fut telle qu’il repartit aussitôt laissant ses troupes de terre qui occupaient toute l’Attique absolument démoralisées par cette défaite et cette fuite. Elles furent battues à Platées. L’indépendance hellénique était sauve et avec elle, tout l’avenir de la civilisation méditerranéenne.

En même temps que la victoire de Salamine — certains disent le même jour — celle d’Himère avait abattu les Carthaginois, partenaires sinon alliés des Perses. Nous en avons déjà parlé. Les Hellènes de Sicile menaient depuis un siècle une existence fort agitée. Il y avait là, sur un territoire relativement restreint, trop de cités opulentes et populeuses. Au lieu d’une opposition violente mais normale entre aristocrates et démocrates, c’étaient véritablement le ploutocratisme et la démagogie qui s’y livraient bataille. À coup d’argent des dictateurs improvisés parvenaient à s’emparer du pouvoir puis, jetés bas, provoquaient des guerres civiles pour le reconquérir, souvent avec l’appui des villes voisines et rivales. C’est ainsi que Métaponte, Sybaris, Crotone, Syracuse, etc eurent sans cesse les armes à la main les unes contre les