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l’hellénisme

visant en général à éviter des conflits ou à en limiter l’étendue. L’idée de trêve sacrée que le moyen-âge devait reprendre et utiliser était à la base de ces conventions. Par la suite l’idée d’arbitrage y pénétra également. Avec le temps les amphictyonies se ramenèrent à deux dont l’une s’assembla chaque printemps à Delphes et l’autre chaque automne aux Thermopyles. Puis il n’y en eut plus qu’une seule qui revêtit dès lors le caractère d’une véritable confédération. Douze « peuples » en faisaient partie. Chaque groupe qui pouvait comprendre plusieurs États avait droit uniformément à deux voix. Rien de plus intéressant à suivre que le prudent travail du conseil ainsi formé. Ses membres semblent avoir eu pleine conscience de leur rôle à la fois étendu et restreint. L’esprit d’indépendance des cités était trop intense pour qu’il fût alors possible de leur superposer les rouages d’une direction fédérale complète. Mais on pouvait faciliter leurs relations, amortir leurs contacts, créer à leur usage une sorte de droit public. Le Conseil amphictyonique n’y manqua pas et lorsqu’on le voit par exemple prescrire aux belligérants des suspensions d’armes pour l’ensevelissement des morts ou bien interdire de couper les conduites d’eau ou de détruire les édifices ou encore spécifier qu’aucun monument commémoratif ne sera élevé par les vainqueurs d’une bataille livrée entre Hellènes afin de ne pas attiser l’esprit de revanche, on comprend la part qui revient à l’influence amphictyonique dans le développement de la civilisation hellénique.

La troisième des institutions dont nous parlons est la plus connue mais non point la mieux comprise. Il s’agit des grands Jeux périodiques : les Jeux isthmiques, néméens, pythiques qui se tenaient dans les régions de Corinthe, de Némée, de Cressa et surtout les Jeux olympiques que l’on célébrait à Olympie tous les quatre ans. L’union intime du sport et de la religion qui caractérisait ces fêtes a déconcerté la postérité, troublée d’ailleurs par leur apparente origine dorienne. Les Doriens cultivaient la gymnastique en raison de son utilité corporelle, disciplinaire, militaire ; et cela explique que les termes techniques en fussent généralement empruntés à leur dialecte. Mais bien avant leur arrivée en Grèce, s’y était manifestée la présence de l’instinct sportif. Les Hellènes du temps de l’Iliade apercevaient déjà dans le sport une marque de noblesse pour qui s’y adonne et « une façon d’honorer les dieux ». « La plus grande gloire pour un homme, dit un héros de l’Odyssée, est d’exercer ses pieds et ses mains. » Et ils comparaient le non-sportif à celui qui, sur