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les arabes

reproduit le plan des basiliques chrétiennes primitives. Utilisant les débris de temples anciens qui se trouvaient à portée, on les avait vus parfois planter les colonnes à l’envers, le chapiteau à terre et le piédestal en l’air. N’ayant point de préférence, ils se mirent volontiers à l’école des Byzantins et des Persans mais bientôt un art différent s’offrit à les servir, celui des Coptes.

Les Coptes[1] étaient des mystiques en réaction contre Byzance et dont l’opposition s’était manifestée jusque dans la conception de la beauté. Répudiant à la fois la coupole et le plein cintre, leur architecture présentait ces caractéristiques contradictoires d’une silhouette extérieure en terrasse et d’un dessin intérieur en ogive. L’arc brisé aigu était-il là pour soutenir le toit et éviter des couvertures qui ne pouvaient plus se faire en pierre comme au temps des Pharaons faute de main-d’œuvre et d’argent et qui ne pouvaient pas non plus se faire en bois, le bois étant trop rare en Égypte ? Ou bien répondait-il à une aspiration de l’âme et symbolisait-il quelque extase mentale ? On peut en disserter à loisir. Mais comme d’autre part les Coptes témoignaient d’une répugnance extrême pour les formes sculpturales et picturales représentant des êtres vivants et se plaisaient à y substituer les motifs stylisés et les figures géométriques fleuries, ils étaient faits pour s’entendre avec les Arabes que les enseignements du coran engageaient dans la même direction. Les artistes coptes furent dès lors au service de ceux-ci et, sous leurs doigts habiles, naquit l’arabesque. Faïences, boiseries, verreries, tentures, tapis, armes damasquinées, l’entrelacement à la fois fantaisiste et discipliné des lignes indéfinies se trouva reproduit partout, sur les murailles et sur les objets, sur le cuir et sur le parchemin. Et passée de là dans le domaine universel, l’arabesque ne cessa plus de charmer le regard par les multiples aspects de ses entrecroisements légers.

Nous pouvons maintenant prendre, au soir de son destin, un aperçu panoramique de ce monde arabe si singulier, attachant et divers. Bien vite rentrée dans le cadre de son autonomie silen-

  1. Volontiers on considère les Coptes comme une race distincte. Ils n’étaient que des Égyptiens christianisés. C’est au concile de Chalcédoine (451) que l’Église copte rompit avec l’Église grecque. Elle subsista longtemps, en union avec l’Église abyssine. Les dialectes coptes se sont éteints vers le milieu du xviie siècle.