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illustrées par les noms de souverains mémorables allaient succéder cinquante cinq années (1025-1081) de défaillances, de coups d’État, d’anarchie. Le péril extérieur avait changé de nom et de direction, voilà tout ; il venait maintenant de l’est et de l’ouest ; les Turcs envahisseurs de l’Asie-mineure étaient presque plus inquiétants que ne l’avaient été les Arabes ; les Normands exploiteurs de la Méditerranée ne l’étaient guère moins que ne l’avaient été les Bulgares. À l’intérieur une sorte de réaction anti-militariste se manifesta. Il se créa un « parti civil ». Des « intellectuels » en furent les instigateurs. Certains réclamaient au nom de la « pensée libre ». Le plus grand d’entre eux, Psellos, fut le premier ministre de Michel VII (1071-1078). Historien, pamphlétaire, poète, orateur, voire même astronome et philosophe, celui qu’on a nommé parfois le « Voltaire byzantin » nous a laissé sur son temps les écrits les plus curieux et donné de son intérieur familial l’impression la plus captivante. Son style plein de verve et d’esprit, l’étendue de son savoir, l’originalité de ses vues font oublier son caractère insuffisant, ses intrigues, ses flatteries, son souci d’être vu et admiré. Le byzantinisme dont Psellos nous a tracé le tableau accusait la décadence. Pourtant il recelait encore beaucoup de forces et c’est pourquoi il devait résister quatre siècles aux pires assauts du destin mais il n’avait plus ces contours robustes qui, aux temps de Justinien, de Constantin V ou de Basile Ier, avaient permis le prompt relèvement de l’empire chaque fois qu’une main puissante s’était trouvée à portée pour saisir le gouvernail.

Ces quatre siècles ne sont plus à proprement parler de l’histoire byzantine. Ils relèvent plutôt de l’histoire des Normands, des Turcs et des croisés. Byzance y apparaît écrasée sous la triple pression de ces adversaires redoutables et la lenteur de son trépas est chose étonnante. Les Commène (1081-1204) en accédant au trône par un coup d’État — salutaire en ce qu’il mettait fin à une période de désordre et d’impuissance — aristocratisèrent définitivement le pouvoir impérial. Ils appartenaient à la haute féodalité militaire. Et sans doute, Alexis (1081-1118), Jean (1118-1142), Manuel (1143-1180) furent des souverains remarquables, bons soldats, bons diplomates, braves, brillants, zélés. Le second mérita d’être appelé Kalojean ce qui signifie Jean l’excellent et le troisième fut la plus séduisante figure de son temps. Mais, en face d’une noblesse de plus en plus exigeante et remuante et dont ils étaient eux-même issus, ils ne purent pas s’appuyer efficacement sur le peuple comme l’avaient fait tant de leurs prédécesseurs sortis du peuple. Pour l’avoir tenté, Andronic