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et d’une telle bassesse morale ait pu ensuite et pendant près de vingt années (867-886) fournir une carrière de grand souverain laborieux, persévérant, économe, voilà de quoi nous surprendre et nous dérouter. Après lui Léon VI qui probablement n’était pas son fils mais censé l’être régna vingt-six ans (886-912). Suivit alors une série singulière. Tandis que Constantin VII, Romain II héritiers légitimes occupaient le trône, des généraux victorieux s’y assirent à leurs côtés : Romain Lécapène (919-944), Nicephore Phocas (963-969), Jean Tsimiscès (969-976) empereurs-associés, tous de réelle valeur et batailleurs infatigables ; puis enfin Basile II (963-1025) qui, à partir de sa majorité et pendant tout un demi-siècle gouverna en autocrate intelligent et audacieux.

Les résultats de cette continuité dans l’énergie et l’activité furent considérables. La Crète, puis Antioche, Damas, Alep reprises aux Arabes (961-995), la Bulgarie si redoutable sous ses grands chefs Syméon (893-927) et Samuel (977-1014) finalement réannexée à l’empire, les conquêtes orientales poussées jusqu’à l’Euphrate et à Erzeroum, la Croatie, la Serbie, les terres vénitiennes placées sous le protectorat byzantin et de même tout le sud de l’Italie, (villes indépendantes comme Naples et Gaète aussi bien que principautés lombardes de Salerne et de Bénévent), la Russie récemment convertie et, par le poste avancé de Cherson (Sébastopol), les princes du Caucase tournés vers Byzance en une sorte de vassalité féconde, ce fut la récompense de tant d’efforts coordonnés et répétés. Lorsqu’en 1018 Basile II accomplit à travers la Bulgarie son triomphal voyage, il put être fier de constater que l’ayant conquise par sa vaillance, il l’avait aussi, par sa sagesse et sa modération, pacifiée en quatre années. Et lorsqu’Athènes reçut la visite impériale, ce dut être dans tout le monde hellénique un émoi singulier que la vue de ce contact entre la gloire présente et la mémoire des grands ancêtres.

D’autant que cette gloire apparaissait solide et raisonnable parce qu’à la différence de ce qu’avait poursuivi Justinien, la force présente reposait sur l’homogénéité. Jamais le noyau de l’empire n’avait été aussi ramassé et compact, aussi « d’un seul morceau » au point de vue de la langue, de la religion, des idées. Le grec dominait partout ; tous, même dans les rangs des troupes mercenaires, s’appliquaient à le parler. L’organisation ecclésiastique était à l’apogée avec cinquante sept métropoles, quarante neuf archevêchés et cinq cent quatorze évêchés. L’université, agrandie et prospère attirait des étudiants de toutes les régions. Malgré l’exagération du régime protectionniste des monopoles et des