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cause, il s’emporte et déchaîne une véritable persécution (765-770). Toute persécution est pourvoyeuse fatale de réaction. Après le règne très bref de Léon IV (775-780) sa veuve Irène, régente pour son fils Constantin VI et qui aura la sinistre énergie de faire aveugler celui-ci devenu majeur pour régner à sa place, juge utile à ses intérêts de s’entendre à nouveau avec Rome. En 787 le concile de Nicée rétablit le culte des images mais l’œuvre des empereurs « iconoclastes » était trop sensée et trop politique pour que ses adversaires en eussent si vite raison. En 815 le concile assemblé à Ste-Sophie restaure les principes qui les avaient inspirés. En 843 ces principes succombent à nouveau ; pour la dernière fois, pourrait-on dire mais la défaite n’est qu’apparente ; en réalité il reste des traces indélébiles de cette longue querelle, de quoi influencer puissamment l’évolution du christianisme à travers les âges, de quoi conduire à la Réforme et aux émancipations progressives de l’esprit humain.

Ce ne sont pas là les seules prémisses de la civilisation moderne que renferment les annales de Byzance. On y relève à chaque pas des nouveautés plus ou moins précisées mais nettement perceptibles. En 687 un empereur convoque une de ces « assemblées de notables » qui seront d’usage en occident bien des siècles plus tard. Puis voici en germe toute une administration ministérielle divisée en départements distincts : guerre, marine, finances, justice, intérieur, transports : autant de portefeuilles dont les titulaires sont responsables devant l’empereur au lieu de l’être devant un parlement. Voici le « Bureau des barbares » où se centralisent les informations de tout ordre concernant les peuples qui encerclent l’empire et chez lesquels il faut entretenir l’admiration tout en tempérant la convoitise car c’est là toute la politique extérieure des Byzantins. Voici enfin de véritables services de « propagande » à la fois économique, religieuse, pédagogique. L’unité byzantine est une réalité vivante quoique nous en pensions à distance et le sens patriotique existe. On a d’ailleurs trop répété qu’il était né beaucoup plus tard en occident ; c’est là une complète erreur. L’Asie l’a connu ; l’antiquité méditerranéenne, également. Il n’en vaut pas moins de signaler un ouvrage byzantin du xme siècle intitulé : le Patriote — car si la chose existait, le mot, en son sens pratique, est d’un emploi nouveau. Au point de vue intellectuel aussi, l’innovation fleurit. La future « chanson de