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protestantisme et, à travers la scrupuleuse observance des rites traditionnels nous sentons s’affirmer la liberté individuelle des fidèles. La grande crise du viiime siècle (726-780) s’évoque alors dans nos mémoires. En apparence la séparation ne s’est produite que bien longtemps après. C’est en 858 que s’est élevée la querelle fameuse entre le patriarche Photius et le pape Nicolas Ier et en 1054 seulement que le patriarche Michel Cérulaire a provoqué une rupture définitive et mis fin aux réconciliations périodiques qui s’étaient accomplies jusque là. Mais en réalité c’est bien à l’empereur Léon III (717-740) et à son fils Constantin V (740-775) qu’incombe la responsabilité d’avoir donné à l’Église grecque sa figure et sa formule finales.

De grands princes, autoritaires et violents mais intelligents et énergiques qui s’imposent triplement au respect de l’histoire par la grandeur de leurs victoires, l’importance de leur législation, la hardiesse de leurs initiatives réformatrices ; victoires opportunes remportées sur les Bulgares et les Arabes — législation multiforme comprenant un code militaire pour fixer les règles de la discipline, un code rural destiné à protéger la petite propriété, un code nautique propre à encourager la marine marchande, un nouveau code civil enfin qu’on nomme l’Écloga, à travers lequel passe par instants ce souffle d’égalitarisme qui s’est manifesté déjà dans la prose enflammée de St Jean Chrysostome. Quant aux réformes, elles visent à purifier la religion. Les images étouffent l’idée ; on les adore ; une sorte d’idolâtrie prosterne des foules devant elles. En Asie surtout ces tendances suscitent des rebellions. L’islam naissant a proscrit toute image. Byzance n’ira pas jusque là. Léon III par sa première ordonnance exige seulement que dans les églises les icones soient appendues plus haut, comme hors de portée des fidèles. Dans le haut clergé, dans l’armée, dans le peuple même son initiative rencontre de chaleureuses approbations. C’est qu’elle atteint les monastères de plus en plus nombreux, de plus en plus riches et vers lesquels telles ou telles images réputées attirent les pèlerins et les dons. Or les progrès du monastisme mettent l’État en péril. L’agriculture, l’armée sont drainées au profit des couvents. Mais ceux-ci sont en mesure de se défendre et reçoivent un renfort considérable de Rome où les pontifes se déclarent en faveur du culte des images. L’Italie attachée à ce culte emboîte le pas. Léon III demeure modéré dans la bataille. Constantin V plus passionné accentue sa politique par des mesures qui semblent devoir aboutir à la suppression du culte de la Vierge et des saints. Et parce que son radicalisme n’a pas aussitôt gain de