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fonctionnarisme complexe mais fortement pénétré de la notion du bien public assumait tous les services, religieux et civils ; le goût des grandes constructions s’affirmait ; l’outillage perfectionné, l’industrie en progrès témoignaient d’un penchant évident pour le travail ordonné et méthodique ; un libéralisme bienveillant réglait les rapports familiaux.

Peu à peu, les petites principautés embryonnaires qui s’échelonnaient du sud au nord tendirent vers l’unité. Le souffle nationaliste vint du sud remontant vers ce delta fertile et pourtant inerte que, plus tard, les Égyptiens regardèrent à tort comme le berceau de leur grandeur. À la longue deux royaumes se formèrent ; celui du sud ne tarda pas à marquer sa suprématie. Thinis en était la capitale et Abydos, la nécropole. Ménès, prince habile et énergique, sut réunir les deux couronnes ; il symbolisa sa victoire en édifiant une nouvelle capitale, Memphis. Il régna soixante ans et inaugura cette monarchie des Pharaons qui devait à travers des péripéties diverses se maintenir pendant près de quatre mille ans et détenir ainsi le record de la durée dynastique.

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On désigne sous le terme insignifiant et imprécis d’« ancien empire » la période d’environ douze cents ans (3400-2200) durant laquelle Memphis domina. L’empire memphite, écrit Gustave Jéquier, présente « un mélange extrêmement curieux de tous les modes de gouvernements ; en haut une souveraineté absolue et théocratique, au dessous une aristocratie héréditaire féodale et terrienne ; enfin, tant pour les provinces que pour l’ensemble du pays, une administration accessible à tous, tenant en même temps de la démocratie et du mandarinat, avec un caractère sacerdotal très marqué ». Il suffisait en effet d’être scribe, intelligent, instruit et actif pour s’élever aux plus hautes charges administratives. D’autre part les prêtres pouvaient cumuler des fonctions civiles avec leurs fonctions sacerdotales ; ils ne paraissent pas s’être recrutés dans une caste spéciale. Que de pareils rouages aient pu fonctionner sans heurts, il nous est difficile de le concevoir mais ce système devait être singulièrement approprié au tempérament et aux besoins du peuple égyptien puisque non seulement il dura autant que l’« ancien empire » mais lui survécut et que chacun des régimes qui se succédèrent par la suite dut, après des essais infructueux pour gouverner autrement, en revenir à l’organisation pharaonique, seule source durable de force et de