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l’hérésie monophysite qui dominait, c’est-à-dire la croyance en la fusion absolue des deux natures divine et humaine en la personne de Jésus-Christ. Les évêques de cette Église comme ceux de l’Église nestorienne furent d’abondants vulgarisateurs. Ils traduisirent et commentèrent non seulement les pères grecs mais les philosophes et les savants de l’antiquité : Platon, Aristote, Euclide. Seulement ils le firent en langue syriaque[1] et par là nuisirent à l’hellénisme sans servir l’iranisme. Inconsciemment ils préparaient l’avenir sémitique et frayèrent aux Arabes les voies de la culture et de la science.

La dynastie sassanide parvint à son apogée sous le long règne de Khosroès Ier (531-579). Ce prince éclairé, énergique et habile qui lisait Platon dans le texte original ne se borna pas à fonder une Faculté de médecine et à offrir asile aussi bien aux chrétiens des diverses confessions, qu’aux derniers philosophes païens chassés d’Athènes par Justinien. Il guerroya pour préserver et maintenir les frontières essentielles mais il guerroya sagement résistant au dangereux mirage des évocations achéménides. Son fils, au contraire, Khosroès II Parviz (le victorieux) qui régna de 598 à 630 se laissa entraîner à de folles entreprises. Il conquit la Syrie, la Palestine, menaça l’Égypte. Finalement ses troupes vinrent camper en face de Constantinople. L’énergie de l’empereur Héraclius l’arrêta en dressant contre lui une sorte de croisade. Khosroès avant de menacer Constantinople n’avait-il pas violé Jérusalem ? La chrétienté s’émut de l’appel qui lui venait d’orient. Héraclius, par une contre-offensive hardie, parvint à remporter sur son puissant adversaire des avantages décisifs. Lorsque Khosroès mourut, il laissait une Perse épuisée par trente années de guerres extérieures qu’un désastre avait terminées. Des troubles en résultèrent. Le temps manqua pour les apaiser et raffermir la situation. Le flot arabe déferlait.

Dans l’histoire, les Arabes appartiennent principalement aux chapitres méditerranéens. Nous les retrouverons plus tard. En ce moment nous n’avons à considérer que leur action en Perse, et la réaction de la Perse sur eux. La bataille de Kadésiya qui dura trois jours et qui se termina par la déroute des cent mille hommes de l’armée sassanide (637) ouvrit aux vainqueurs les portes de Ctésiphon et de Séleucie. Une seconde bataille non moins acharnée

  1. Le syriaque ou araméen appartenait au groupe des langues sémitiques. Il fut répandu du iie au viiie siècle. L’arabe le réduisit au rang de langue morte. Il en reste des traces dans certains dialectes encore en usage dans la région de Mossoul.