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empires de l’est : thibet

conséquences immédiates, limiter la victoire des uns, adoucir la défaite des autres. La dynastie mandchoue finalement y perdit sa couronne et une république inattendue prit sa place.

Sera-ce pour la Chine l’occasion d’un renouveau décisif ? Elle en trouverait les directives dans ses glorieuses annales.


Thibet

L’importance géographique du Thibet par rapport à la Chine se définit en deux mots. Il y conduit et il la menace. Le Thibet est à la fois une route et un redan ; mais pour autant seulement que ce pays ait une organisation quelconque. La sienne fut tardive. Vers l’an 600 ap. J.-C. un chef thibétain parvint à réunir en un faisceau les tribus éparses et demi-sauvages qui erraient sur ce plateau farouche. Son successeur, inquiet sans doute d’en faire façon, appela à son secours les moines bouddhistes de l’Inde. C’était d’ailleurs un homme vaillant qui, ayant attaqué les Chinois et été battu par eux, leur avait inspiré assez de respect pour obtenir de l’empereur la main d’une princesse chinoise. Est-ce à elle que pensait le grand poète Li Taï Pé lorsqu’il s’apitoyait sur « la perdrix exilée auprès d’un vautour de Tartarie, là-haut, bien loin dans la montagne glacée ». La perdrix en l’espèce, fit de la politique chinoise et fort habilement. Devenue régente à la mort de son mari, elle s’employa à faciliter de toutes manières le passage des pèlerins bouddhistes qui se rendaient dans l’Inde et à en accroître le nombre. Bientôt commença cet étrange duel entre les ambitions séculières et la théocratie qui devait durer plusieurs siècles et se terminer par la victoire des moines. Les premiers monastères de Lhassa furent fondés par le roi Khrisrang (755-780). Mais la suprématie monastique avait à lutter contre les mœurs volontiers belliqueuses des tribus. De temps à autre, un chef de bande se présentait qui tenait tête au clergé et tournait le pays vers la guerre. Alors des expéditions suivies de fructueux pillages s’organisaient au détriment des voisins de Chine ou de Kachgarie. Au retour, enorgueillis, les guerriers parlaient haut. En 838 une véritable rébellion éclata. Les moines se délivrèrent par l’assassinat de celui qui la dirigeait et, pour éviter le retour d’une semblable aventure, ils divisèrent le pays en principautés rivales dont eux-mêmes furent les arbitres. L’an mille eut lieu la prédication du célèbre hindou Aticha qui avait été appelé au Thibet pour réformer la religion. Au siècle